lundi 24 décembre 2012

Charente : une famille disparue depuis Noël 1972

Ce lundi soir, cela fera exactement quarante ans que la famille Méchinaud a disparu sans laisser de trace. Ni de vie, ni de mort. Quatre décennies d'énigme totale autour d'un fait divers devenu l'affaire des « disparus de Boutiers ». Encore aujourd'hui, à la faveur de nouvelles recherches ou découvertes, elle génère fantasme, fascination et hypothèses les plus folles.
Le 24 décembre 1972, Pierrette et Jacques Méchinaud réveillonnent chez des amis cognaçais, les Fontanillas, rue des Plantes. Les deux familles ont passé l'après-midi ensemble. Pierrette a 29 ans ; Jacques, 31 ans. De leur union, sont nés deux garçons, Éric, 7 ans, et Bruno qui en a 4. La veille, les parents ont fait les emplettes de Noël pour leurs deux garçons.

Une soirée détendue
La petite famille vit depuis deux ans et demi au village de Boutiers-Saint-Trojan, juste à côté de Cognac. Jacques a grandi à Bourg-Charente, Pierrette, née Esnard, à Saint-Même-les-Carrières. Décrit comme travailleur, Jacques Méchinaud est employé à l'usine verrière Saint-Gobain de Châteaubernard. Son épouse élève les enfants et s'occupe du logis, mais semble s'ennuyer.
La soirée entre amis se déroule dans une ambiance détendue. Vers 1 ou 2 heures du matin, Jacques met en route la voiture familiale, une Simca 1 100 couleur grenat. La maison est à 3,5 kilomètres de là, à l'entrée de Boutiers. Une fois le moteur chaud, il appelle Pierrette, Éric et Bruno. La Simca démarre, quitte la rue des Plantes et s'engouffre dans l'épais brouillard de la nuit de Noël 1972.
Le 6 janvier 1973, Pierre Esnard, le père de Pierrette, signale à la gendarmerie la disparition de sa fille, de son beau-fils et de ses deux petits-enfants. Quand les gendarmes se rendent à la maison aux volets verts de Boutiers, ils y découvrent les cadeaux emballés, posés au pied du sapin de Noël ainsi que la dinde et les huîtres au réfrigérateur. Ils retrouvent aussi un chéquier, des papiers d'identité et le livret de famille.
À partir du 10 janvier, d'importants moyens de recherche sont mobilisés. La Charente est survolée par hélicoptère. Son lit est sondé par les plongeurs sapeurs-pompiers. Les étangs du Cognaçais et le ruisseau du Né sont également inspectés. En vain.
Un homme-grenouille qui a participé aux recherches se souvient parfaitement de ce mois de janvier 1973. « On a commencé les recherches au pont de Saint-Jacques, puis on a fait toutes les berges jusqu'à Boutiers. On est remonté jusqu'à Merpins. On a vérifié les fosses que l'on connaissait. On n'a rien trouvé, pas la moindre chose, rien du tout. On n'a pas vu une seule trace de pneu sur les berges. »
Un époux trompé
Faute d'indice, à deux reprises, des radiesthésistes sont appelés à la rescousse. C'est encore l'échec. Au fil des recherches, la vie du couple Méchinaud, présenté comme sans histoire, laisse apparaître des failles.
Il est avéré que Jacques et Pierrette traversaient un moment difficile. Pierrette entretenait depuis quelque temps une relation extraconjugale avec le voisin. Jacques l'avait découvert. Depuis combien de temps ? Mystère.
D'un tempérament jaloux et impulsif, Jacques acceptait très mal son infortune. Ses proches avaient ressenti un certain malaise. Quelques mois plus tôt, à la Foire-expo d'Angoulême, il avait prévenu Jean-Paul, son frère, et France, l'épouse de ce dernier, que si son couple devait exploser, « tout le monde disparaîtrait ».
Mécano averti, Jacques Méchinaud travaillait au noir. Et disposait d'argent en liquide. Était-ce suffisant pour envisager et préparer une autre vie ? Aucun mouvement bancaire n'a en tout cas été enregistré après que la famille s'est volatilisée.
Suicide, accident, fuite ?
Le 23 décembre, Pierrette aurait dit son intention de se séparer de son époux. Que s'est-il passé ensuite ? Nul ne peut le dire. Les derniers à avoir vu les Méchinaud sont les Fontanillas. Dans « Sud Ouest » daté du jeudi 18 janvier 1973, le journaliste Jean-Marie Sallée rapporte les propos des Fontanillas, qui se montrent formels : « Ils ne se sont pas querellés. On a seulement remarqué que Jacques était plus instable que d'habitude. »
Une dispute aurait-t-elle éclaté sur le chemin du retour ? Toutes les hypothèses ont dès lors été échafaudées sans que l'une ne prenne le dessus : suicide collectif, accident, fuite pour une nouvelle vie, mauvaise rencontre ?
Les avis sont nombreux, mais les preuves inexistantes. La troublante découverte d'ossements à Courcerac (lire ci-contre), en Charente-Maritime, en octobre, relancera-t-elle l'enquête ?
Quarante ans plus tard, l'affaire des disparus de Boutiers reste pour l'heure une énigme parfaite.
Sources : articles de Jean-Marie Sallée pour « Sud Ouest », le 18 janvier 1973, le 19 janvier 1973, le 20 janvier 1973. Articles du 11 mars 1981 et du 24 novembre 2011

http://www.sudouest.fr/2012/12/24/les-disparus-de-noel-1972-917234-853.php

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